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NEUROSCIENCES : RECHERCHES

 
 

45. NEUROSCIENCES

Face à trop de médias, le cerveau perd-il les pédales ?

 

Manier plusieurs canaux d’information en permanence – internet, téléphone, télévision, etc- n’est pas forcément une gymnastique profitable pour le cerveau, suggère une étude.

Surfer sur le web tout en écoutant une émission de télé, en répondant à son téléphone, en ‘microbloggant’ sur Twitter ou en jouant à un jeu vidéo… Comment le cerveau humain peut-il gérer autant d’informations venant de médias différents alors qu’il est prouvé que téléphoner au volant distrait les conducteurs?

Pour tenter de comprendre comment ce mode de fonctionnement ‘multitâche’ affecte notre façon de traiter l’information, des chercheurs de l’Université de Stanford (Californie, E-U) ont sélectionné des étudiants habitués à manier de nombreux supports d’informations différents et d’autres qui l’étaient moins. L’ensemble des 262 volontaires ont été soumis à des tests cognitifs afin de vérifier par exemple leur capacité à passer d’une activité à une autre ou à trier l’information.

Etonnamment, Clifford Nass et ses collègues constatent que le groupe le plus multitâche est celui qui obtient les moins bons scores aux tests. Ces habitués du ‘plurimédia’ ont plus de difficultés à filtrer une information sans intérêt, à ignorer quelque chose qui va les distraire ou même à passer d’une activité à une autre, expliquent les chercheurs dans les Proccedings of the National Academy of Sciences publiés cette semaine. Les étudiants ont par ailleurs des capacités de mémoire ou de travail similaires, soulignent les auteurs.

Ceux qui jonglent en permanence avec plusieurs canaux d’information sont peut-être moins capables de centrer leur attention sur une seule chose et de résister à la distraction, analysent les chercheurs. Reste à savoir si ce manque de contrôle résulte de la consommation de divers médias ou s’il pousse les étudiants à cette diversification…

Certaines études suggèrent que le cerveau n’est pas naturellement multitâche : ainsi lorsqu’un conducteur parle au téléphone son attention visuelle est diminuée (1). D’autres travaux tendent à montrer que le cerveau peut être entraîné à passer plus efficacement d’une activité à une autre : on pourrait donc s’exercer à être ‘multitâche’ même si le cerveau, lui, continue à réaliser une tâche après l’autre (2).

Quoi qu’il en soit, l’étude menée à Stanford pose le problème des effets des nouvelles technologies sur nos capacités cognitives, effets encore peu explorés par la recherche. Nous savons désormais que le cerveau est très plastique, même à l’âge adulte, et que l’utilisation de nouveaux outils a un impact sur notre activité cérébrale.

Naviguer sur internet est une bonne gymnastique cérébrale, affirmaient il y a quelques mois des chercheurs : cela permet le développement de circuits cérébraux impliqués dans le raisonnement et la prise de décision. Testés sur d’autres performances cognitives, les étudiants ‘multitâche’ auraient peut-être un avantage sur les autres, suggèrent Clifford Nass et ses collègues.

Dans le monde scientifique, qui fut le premier à utiliser internet, la publication des articles et des travaux en ligne est en train de modifier en profondeur les habitudes des chercheurs. Ils peuvent désormais scanner un très grand nombre de documents à partir de quelques mots clefs, les parcourir et les indexer, relèvent ainsi Allen Renear er Carole Palmer dans un article publié par la revue Science (14 août). Il y aura donc vraisemblablement de plus en plus de références dans les publications scientifiques mais pas pour autant plus d’articles lus par tête chercheuse.

Dans son article intitulé Google nous rend-il stupide? (3), l’écrivain américain Nicholas Carr s’inquiète des effets appauvrissant de l’internet sur notre capacité à lire et à penser en profondeur. « Autrefois j’étais un plongeur des profondeurs dans l’océan des mots. Maintenant je glisse sur la surface comme un pilote de Jet Ski ». En modifiant notre façon de lire, le fameux moteur de recherche modifie aussi notre façon de penser, estime Nicholas Carr.

Cécile Dumas

Sciences-et-Avenir.com
26/08/09

(1) Etude publiée par Steven Yantis et alii le 21 juin 2005, The Journal of Neuroscience.
(2) Etude publiée par Paul Dux et alli dans la revue Neuron datée du 15 juin 2009.
(3) The Atlantic, juillet/ août 2008

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